Haïti / Politique
L’Exécutif joue avec le feu !
L’opposition, en l’état actuel des choses, dispose de deux armes redoutables au regard de ses efforts et stratégie pour renverser le Président Martelly : les manifestations et la grève générale. Tout compte fait, le cout de la grève générale est moins onéreux pour les organisateurs par rapport aux manifestations qui nécessitent des déboursés substantiels. En termes de résultats, la grève se révèle psychologiquement, politiquement et économiquement dévastatrice. En témoignent les efforts et stratagèmes de l’Exécutif pour en diminuer les effets aux yeux et dans les esprits de la population.
La baisse des prix des produits pétroliers sur le marché international et le maintien à la hausse des prix sur le marché local sur fond de l’Accord Petro Caribe sont habilement exploités contre le Pouvoir dans cette situation de banqueroute. L’appel à la grève générale a visiblement plus que marché. L’opposition politique a pu, autant que faire se peut, ramener à sa cause la majorité visiblement insatisfaite de la gouvernance économique et financière du Régime Tet kalé
Le Premier Ministre Evans Paul, en »bon stratège du béton » et familier avec les situations de grande agitation politique aurait fait mettre gratuitement en service, le deuxième jour de la grève générale, les autobus »Diyite » pour calmer un peu les esprits au sein de la population. La Police sur demande expresse de la Primature renforçait sa présence également sur les axes routiers et points stratégiques. Autant dire que le gouvernement s’activait lui aussi tant par des messages musclés que par des appels au calme à l’endroit de la population dans le strict respect des droits et devoirs.
Les étudiants de l’Université d’Etat d’Haïti à travers les Facultés les plus engagées sont entrés en scène, en signe de solidarité avec la majorité pauvre en proie à une misère infrahumaine. La police a réagi avec des tirs de gaz lacrymogène pour limiter les dégâts. Les étudiants pour le moment semblent se limiter au dossier du prix élevé de l’essence en mettant une certaine sourdine aux appels de l’opposition pour renverser le régime Tet Kalé. Ils prévoient un »gaznaval » en lieu et place du carnaval des étudiants organisé traditionnellement le vendredi d’avant les 3 jours gras.
Le Conseil Electoral Provisoire (CEP) emmené par Pierre Louis Opont concomitamment proposait sans consultation et concertation son ‘’Décret électoral’’, apparemment pour donner l’impression d’être aux commandes. Une initiative somme toute relativement mal accueillie dans la conjoncture sociopolitique actuelle.
A ce stade, il est très peu probable que Fanmi Lavalas, le Mopod, la Plateforme ‘’Pitit Dessalines’’, et alliés desserrent l’étau, tenant compte de l’affaiblissement grandissant du régime et de la méfiance qui a toujours caractérisé les relations entre les deux camps.
Le Président Martelly aurait perdu beaucoup de sa popularité, si on peut le présenter ainsi. En, au moins, deux occasions, son cortège présidentiel a essuyé ces derniers jours des jets de pierre en provenance de la population.
La Communauté internationale à travers le ‘’Core group’’ évalue et observe. Le Gouvernement et le Premier Ministre sont en quête d’affirmation dans l’hésitation évidente. Sur cet aspect-là, KP a marqué des points dans sa gestion de la grève générale comme PM, également Président du Conseil Supérieur de la Police Nationale (CSPN).
Quelle est la capacité effective de l’opposition au regard de ses objectifs ? De quelle opposition parlons-nous et à quelle opposition faisons-nous référence ? Composée de qui ? Sous le leadership de qui ? Les observateurs et analystes avisés des questions politiques haïtiennes admettront que chacun a son agenda propre dans ce galimatias où tout se ramène aux questions de pouvoir, argent et privilèges en toute impunité et indécence.
Le CEP en mettant en circulation la proposition de Décret électoral provoque à dessein la perception d’une dynamique électorale à l’état latent. Quid du financement quand on sait que l’argent ne proviendra pas du Trésor public ? Le Gouvernement dans sa composition actuelle est-il viable ? Les Etudiants de la Faculté d’Agronomie ont lancé un véritable défi aux autorités en s’opposant à la prise de fonction du Ministre et des 2 Secrétaires d’Etat nommés à la tête du ministère de l’Agriculture. Il y a aussi la question de décharge de plusieurs Ministres.
Entretemps, le Sénateur Simon Dieuseul Desras revient le mercredi 10 février 2015, moins d’un mois après le lundi 12 janvier 2015, au Sénat de la République muni d’un document en bonne et due forme du Tribunal des Référés. Le CEP du Président Gaillot Dorsainvil et du Directeur général Pierre Louis Opont actuel Président de l’actuel CEP lui avait délivré suite à un jugement du Contentieux électoral un certificat mentionnant que son mandat comme Premier Sénateur du département du Centre prend fin en 2017 au même titre que le Sénateur Francisco Delacruz(OPL). Le ‘’move’’ du Sénateur Desras est prudemment commenté avec malaise dans les milieux politiques.
Rien n’est gagné d’avance dans cette partie de poker menteur qui se joue fondamentalement contre le Peuple haïtien. Tout va dépendre, après les festivités carnavalesques, des Puissances tutrices d’Haïti qui avaient fait savoir par la voix de l’Ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU, Samantha Power, qu’il s’agira d’un ‘’win-win’’ pour les deux camps. Les Etats Unis, la France par extension l’Union européenne, le Canada et leurs suppôts nationaux se retrouvent à ce moment historique en panne de politiciens haïtiens présidentiables et acceptables. La Majorité pauvre a compris et elle s’éveille lentement mais surement, en dépit de l’absence d’un Leadership.
Jean Frantz LASERRE
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